A. LES MODALITES PRATIQUES DE LA REPRISE D’ACTIVITE DANS L’ENTREPRISE ET LA MISE EN CAUSE DE LA RESPONSABILITE DE L’EMPLOYEUR EN CAS DE MANQUEMENTS

La pandémie de la Covid-19 a entraîné une modification de l’activité des entreprises, qui impose une adaptation des conditions de travail des salariés.
Pour organiser au mieux la reprise d’activité, l’employeur aura à coeur de récapituler les difficultés auxquelles il lui faut faire face en évaluant les risques exposant la santé et la sécurité de ses travailleurs (1.), et organiser les nouvelles conditions de travail (2.).
A défaut, des manquements de sa part l’exposeraient, au-delà d’un manquement à son obligation de sécurité prévue par le Code du Travail, au risque de voir sa responsabilité pénale mise en cause (3.).

1. Evaluer les risques professionnels au sein de l’entreprise

Mettre à jour le Document Unique d’Evaluation des Risques (DUER)

L’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Selon l’article L.4121-1 du code du travail, ces mesures comprennent :

✓ des actions de prévention des risques professionnels ;
✓ des actions de formation et d’information ;
✓ la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Dans le cadre de son obligation de sécurité, l’employeur doit procéder à une évaluation des risques professionnels pour la santé et la sécurité de ses travailleurs, et, par suite, mettre en oeuvre les actions de prévention et les méthodes de travail garantissant le meilleur niveau de protection.
Cette évaluation doit être renouvelée en raison de l’épidémie de Covid-19, pour réduire au maximum les risques de contagion sur le lieu de travail ou à l’occasion du travail (art. R.4121-2 du code du travail).
Les résultats de cette évaluation doivent être retranscrits dans le Document Unique d’Evaluation des Risques, conformément aux dispositions des articles R.4121-1 et suivants du Code du travail.

Concrètement, le Document Unique d’Evaluation des Risques doit :

✓ Anticiper les risques liés à l’épidémie de Covid-19

✓ Identifier les situations de travail dans lesquelles les salariés peuvent être exposés au virus

✓ Analyser concrètement les situations de travail de l’entrée à la sortie du travail, ainsi qu’au poste de travail (ex. : dans les parkings, dans les vestiaires, dans les couloirs, dans les cantines, etc…) pour éviter ou à défaut limiter le risque de contamination.

Le rôle joué par les représentants du personnel est essentiel. Le CSE devra être préalablement consulté s’agissant de toutes les mesures pouvant être adoptées modifiant de manière importante l’organisation du travail et concernant la santé et la sécurité des salariés.

Le CSE pourra être également étroitement associé à l’analyse des situations à risque, pour mieux les recenser et trouver les mesures appropriées.

Les mesures de prévention qui découlent de l’actualisation du DUER doivent être portées à la connaissance des salariés.

L’actualisation du Règlement intérieur de l’entreprise

Le règlement intérieur – devenu obligatoire dans les entreprises employant au moins 50 salariés depuis le 1er janvier 2020 – doit contenir des règles relatives à l’hygiène et à la sécurité des travailleurs.

Compte tenu des risques liés à l’épidémie de Covid-19 et des mesures de protection à mettre en place pour en limiter la propagation, l’employeur doit fixer dans le règlement intérieur, les nouvelles instructions en matière de sécurité qu’il entend faire respecter par ses salariés sur le lieu de travail.

Par exemple, si le port du masque protégeant contre la contamination virale devient obligatoire, il faut modifier le règlement intérieur, et préciser les moyens de protection utilisés par le salarié (art. L.4122-1 du code du travail). Il en sera de même si l’employeur

Ainsi, toute nouvelle mesure d’application des règles en matière de santé et de sécurité dans l’entreprise devra faire l’objet de la procédure de modification du règlement intérieur (art. L.1321-4 du code du travail)

– avis du CSE,
– communication à l’inspection du travail,
– définition d’une date d’entrée en vigueur, qui doit être postérieure d’un mois minimum à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité,
– formalités légales de dépôt et publicité de la modification.

2. Organiser les conditions de travail des salariés dans l’entreprise

Le travail peut être repris dans l’entreprise dans le cadre du télétravail, ou en présentiel, lorsque l’activité de l’entreprise rend impossible le travail à distance.

Encourager le télétravail pour les salariés dont la nature des fonctions permet de travailler à distance

Le télétravail continue d’être la mesure privilégiée par le Gouvernement, dès lors que cette organisation du travail répond au double objectif (i) de maintenir l’activité de l’entreprise et (ii) de protéger la santé des salariés.
En principe, le télétravail revêt un caractère volontaire et doit faire l’objet d’un accord entre le salarié et l’employeur.

Mais il supporte une exception en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, puisque la mise en oeuvre du télétravail peut être considérée « comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés » (Art. L.1222-11 du code du travail).

Dans le contexte pandémique, l’employeur peut donc décider d’imposer le télétravail à son salarié, sans avoir à recueillir son accord exprès.

 

Attention !

S’il est possible pour l’employeur d’imposer unilatéralement le télétravail à son salarié, sans avoir à négocier un accord collectif ou adopter une charte, il est néanmoins vivement recommandé :

– D’en informer et de consulter le CSE sur cette mesure exceptionnelle (si besoin, en tenant une réunion par visioconférence)

– D’informer rapidement le salarié sur les conditions du travail à distance tels que, notamment, le respect des durées maximales de travail, des repos quotidien et hebdomadaire, du droit à la déconnexion.

 

Le refus du salarié de se soumettre au télétravail ne constitue pas un motif de rupture de son contrat. Le licenciement est exclu mais l’employeur peut décider de :

– Prononcer une sanction disciplinaire

– Suspendre le paiement du salaire, dès lors que le salarié s’abstient volontairement d’effectuer le travail qui lui est demandé.

A l’inverse, le salarié peut exiger d’être mis en télétravail. Un refus de l’employeur est possible, mais il convient de le motiver de façon pertinente.

 

Garantir la sécurité des salariés qui doivent revenir travailler en présentiel dans l’entreprise

Lorsque la reprise du travail se fait sans contact avec le public

 

Les employeurs qui demandent à leurs salariés de revenir travailler sur place doivent veiller, notamment :

– A aménager les postes de travail, pour permettre une distance d’un mètre entre chaque personne. Dans les open spaces, l’installation de cloisons entre les bureaux est recommandée ;

– A éviter les contacts proches, ce qui signifie condamner les ascenseurs ou limiter leur utilisation à une seule personne à la fois ;

– A fermer les cantines ou les organiser de manière à maintenir les limites de distanciation ;

– A rappeler les « gestes barrières » à respecter en permanence. A cet égard, le site du Ministère des Solidarités et de la Santé propose des affiches à placarder à tous les endroits de passage des salariés ;

– A équiper les locaux de mouchoirs en papier, flacons de gel hydroalcoolique, masques de protection individuelle

– A renforcer le ménage, par l’utilisation de désinfectants.

 

Il est vivement conseillé de se ménager des preuves des mesures de précaution et de sécurité qui sont prises, pour pouvoir en justifier postérieurement, si nécessaire.

 

Lorsque la reprise du travail se fait en contact avec la clientèle

Au-delà des mesures barrières rappelées ci-dessus, il est également recommandé par le Gouvernement d’utiliser pour le personnel en contact direct avec la clientèle :

– Des vitres en plexiglas protégeant les salariés du public
– Des masques de protection individuelle,
– Des visières
– Des gants
– Des blouses

Pour adapter au mieux les mesures de protection à l’activité de l’entreprise, l’employeur ne doit pas hésiter à solliciter les services de santé au travail pour les associer à l’établissement de plans de prévention, ou de nouveaux protocoles de fonctionnement.

 

3. Les risques de mise en cause de la responsabilité pénale de l’employeur

Plus que jamais, l’entreprise est tenue à une obligation de sécurité de résultat, puisqu’au-delà d’assurer la santé des salariés, elle doit aussi assurer la santé publique.

La responsabilité pénale de l’employeur risque donc d’être engagée en cas de contamination avérée sur le lieu de travail, sur la base de 3 qualifications différentes.

La mise en danger d’autrui

Elle se définit comme « le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement » (art. 223-1 du code pénal).

Appliquée au risque sanitaire que fait courir le Covid-19 dans l’entreprise, cette incrimination nécessite de démontrer qu’il y aurait une obligation spéciale de sécurité édictée par la loi ou le règlement qui aurait été violée par l’employeur.

Si, à ce jour, aucune disposition légale ou réglementaire n’impose l’obligation d’utiliser du gel hydroalcoolique, ou de porter des gants ou des masques sur le lieu de travail, la situation pourrait être différente si une telle obligation venait à être spécifiquement prévue par un décret par exemple.

La non-assistance à personne en danger

Elle se définit comme « le fait pour quiconque de s’abstenir volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours » (art. 223-6 al. 2 du code pénal).

Il existe un risque que l’insuffisance des mesures de protection des salariés (telles qu’un manque de masques, ou la violation des règles de distanciation sociale) puisse être considérée par les juges comme une abstention volontaire de la part de l’employeur caractérisant l’infraction.

Pour limiter son risque pénal, il appartiendra donc à l’employeur de réagir immédiatement en cas de contamination ou de suspicion de contamination, en renvoyant le salarié à son domicile ou en appelant le 15 en cas de symptômes graves.
Il devra également informer les salariés qui ont pu être en contact avec le malade, et désinfecter immédiatement les espaces de travail.

L’homicide ou les blessures involontaires

Ils se définissent comme « le fait de causer à autrui, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort » ou « une incapacité totale de travail pendant plus de 3 mois » (art. 221-6 et 222-19 et suivants du code pénal).

Pour engager la responsabilité de l’employeur, le salarié devra démontrer un lien de causalité certain entre l’absence de mesures de protection de sa santé et la survenance de la maladie.

La preuve pourra être difficile à rapporter au regard de la contagiosité du virus, et de l’éventualité qu’il a pu être contracté en tout autre lieu.

Quoi qu’il en soit, il a déjà été jugé que la carence du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER) peut, en cas de sinistre, motiver une condamnation de l’employeur sur le terrain de l’atteinte involontaire à la vie ou à l’intégrité des personnes (Cass. Crim. 6 septembre 2016, n°14-86606).

 

En conclusion, pour se prémunir d’une mise en cause de sa responsabilité pénale, l’employeur devra adopter les bons réflexes et notamment :

– Recueillir l’avis du CSE sur les mesures nécessaires pour la protection de la santé des travailleurs ;

– Veiller au respect des règles de distanciation et des gestes barrières

– Recourir au télétravail autant que possible, ou aux visioconférences

– Actualiser le document unique d’évaluation des risques

 

 

A. FAIRE FACE A LA REPRISE D’ACTIVITE – OUTILS DE GESTION POUR L’EMPLOYEUR

Dans le contexte de reprise d’activité, chaque Société est amenée à rencontrer des situations différentes en fonction du secteur d’activité et de l’incidence du maintien d’activité pendant cette période de confinement.

Deux situations peuvent être distinguées selon que la reprise d’activité se traduise par une baisse (1) ou par une hausse d’activité (2).

Il sera évoqué ci-dessous des pistes de réflexion concernant les outils à la disposition de l’employeur pour gérer ces deux cas de figure.

1) Quelles possibilités dans le cadre d’une baisse d’activité ?

→ Prolongation de l’activité partielle

Le dispositif d’activité partielle de longue durée (APLD) mis en place par la 2e loi d’urgence sanitaire permet aux entreprises qui subissent une réduction d’activité durable de réduire l’horaire de travail de leurs salariés jusqu’à 40 % de la durée légale de travail (loi 2020-734 du 17 juin 2020, art. 53, JO du 18 ; décret 2020-926 du 28 juillet 2020, JO du 30).

L’employeur qui mobilise l’APLD doit prendre des engagements en matière de maintien de l’emploi.

Le dispositif, ouvert jusqu’au 30 juin 2022, est mis en place soit par accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe, soit sur la base d’un document unilatéral élaboré par l’employeur après consultation du CSE si l’entreprise est couverte par un accord de branche étendu d’APLD.

L’APLD peut être mobilisé pour une durée pouvant aller jusqu’à 24 mois, consécutifs ou non, sur 36 mois.

L’indemnité versée au salarié en APLD s’élève à 70 % de la rémunération horaire brute de référence, retenue à hauteur de 4,5 SMIC maximum.

Sauf cas particuliers, l’indemnité versée au salarié est au moins égale au SMIC net (8,03 € / heure, à l’heure où nous rédigeons ces lignes).

En remboursement, l’employeur reçoit une allocation dont le taux est de 60 % de la rémunération horaire brute de référence, retenue dans la limite de 4,5 SMIC, y compris au-delà du 1er octobre 2020, selon un projet de décret.

Le taux horaire minimum est d’au moins 7,23 €.

 

→ Prise de congés payés ou de jours RTT

Jusqu’au 31 décembre 2020, un accord d’entreprise (donc aussi un accord de groupe) ou, à défaut, de branche peut réduire au minimum à un jour franc le délai de notification des dates de congés payés de chaque salarié.

Cette mesure exceptionnelle se substitue à toutes les pratiques en vigueur, accords précédents, procédure interne, usage, tolérance.

L’accord collectif peut également autoriser le fractionnement des congés payés sans l’accord du salarié.

Ce fractionnement unilatéral peut concerner l’ensemble des congés payés à l’exception de la période continue de 12 jours ouvrables.

Il peut revenir sur la prévision de fermeture de sites au mois d’août.

Par la négociation collective, il a été admis qu’il puisse être modifié :
– La période pendant laquelle les congés peuvent être pris
– L’ordre de départ des congés
– Les délais que doit respecter l’employeur pour modifier l’ordre et la date des départs.

A défaut d’accord collectif, l’employeur peut fixer unilatéralement, après avis du comité social et économique, la période de prise de congés.

Il peut également imposer l’ordre de départ en congés en prenant en compte des critères objectifs.

Concernant la prise de congés, il a été prévu pour :

– pour les congés payés :

L’ordonnance du 25 mars 2020 dispose que, par dérogation au Code du travail et aux stipulations conventionnelles applicables dans l’entreprise, un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche peut autoriser l’employeur, dans la limite de six jours de congés et sous réserve de respecter un délai de prévenance d’un jour franc minimum, à imposer la prise de jours de congés payés acquis par un salarié, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris, ou à modifier unilatéralement les dates de prise de congés payés.

La période de congés imposée ou modifiée ne peut s’étendre au-delà du 31 décembre 2020.

– pour les jours RTT :

Lorsque cette mesure est nécessaire pour faire face aux difficultés économiques liées à la propagation du Covid-19, la direction peut unilatéralement, sans passer par un accord collectif et quelle que soit son activité, imposer la prise de JRTT laissée habituellement au choix du salarié .

Il en va de même des jours de repos des salariés en forfait en jours. Elle peut enfin imposer le déblocage des droits capitalisés dans le compte épargne-temps.

Le nombre total de jours, dont la prise peut être imposée dans ce cadre, est plafonné à dix, tous congés confondus.

→ Utilisation de la flexibilité offerte par les accords d’aménagement annuel du temps de travail

A ce titre, il peut être envisagé de réduire la durée du travail durant la période de baisse d’activité et d’augmenter les heures au sortir de la crise.

Cela suppose qu’un accord d’aménagement de la durée du travail existe au sein de l’entreprise et d’en informer les représentants du personnel.

La conclusion d’un avenant à cet accord est à envisager.

→ Accord de performance collective ( APC)

L’accord de performance collective est particulièrement adapté à la situation des entreprises qui sont dans l’impossibilité de maintenir en totalité leur activité.

En effet, son objet est notamment « de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise » ou « de préserver (…) l’emploi ».

En outre, il peut :

– aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition ;
Il peut être envisagé à ce titre la réduction collective de la durée du travail pendant une période limitée par exemple.
Cette possibilité permet de compenser l’absence de possibilité d’utiliser la flexibilité offerte par un accord d’aménagement annuel du temps de travail.

– aménager la rémunération, sous réserve de respecter le Smic et les salaires minimas conventionnels ;

– déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l’entreprise.

L’accord peut donc porter sur ces thèmes.

Quelles modalités d’adoption ?

En dépit de son caractère dérogatoire, l’accord de performance collective relève du régime des accords d’entreprise.

Dans les entreprises pourvues de délégués syndicaux, ils sont soumis à la règle de l’accord majoritaire : signature par des organisations syndicales représentatives représentant 50 % des salariés et, à défaut, représentant 30 % des salariés et approuvé par les salariés à la majorité des salariés concernés .

Ils peuvent également être conclus dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, avec les différents interlocuteurs prévus par le Code du travail en fonction de l’effectif de l’entreprise.

Il y aura lieu de requérir l’accord des salariés par référendum (adoption de l’accord à la majorité des 2/3).

Quels effets en cas de conclusion d’un accord de performance collective ?

Les dispositions d’un tel accord dit de « performance collective » se substituent de plein droit aux clauses contraire et incompatibles des contrats de travail en dehors de toutes difficultés économiques.

Les salariés qui refusent l’application de cet accord collectif peuvent faire l’objet d’un licenciement, fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Autrement dit, un accord d’entreprise peut modifier les dispositions des contrats de travail.

Lorsque le salarié refuse l’application de l’accord de performance collective, l’employeur peut décider de le licencier.

Le licenciement repose alors non pas sur une cause économique mais sur un motif spécifique (on parle de licenciement sui generis), qui constitue une cause réelle et sérieuse (C. trav., art. L. 2254-2).

2) Quelles possibilités dans le cadre d’une augmentation de l’activité ?

→ Dérogations à la durée du travail admises dans certains secteurs d’activité

Jusqu’au 31 décembre 2020, les entreprises exerçant des activités particulièrement nécessaires à la sécurité du pays et à la continuité de la vie économique et sociale peuvent déroger aux durées maximales journalières et hebdomadaires du travail.

L’application de ces dérogations ne nécessite pas la conclusion d’un accord collectif les autorisant.

Elles ne sont pas non plus subordonnées à une autorisation de l’inspection du travail.

Elles peuvent donc être appliquées unilatéralement par la direction.

Ces durées maximales se substituent automatiquement à celles imposées par des dispositions conventionnelles existantes.

Elles devront néanmoins faire l’objet d’une information immédiate du CSE et de la DIRECCTE.

Les dérogations sont prévues dans les termes suivants :

▪ 12 heures par jour (au lieu de 10 heures, ou 8 heures pour les travailleurs de nuit).

Remarques :

L’application de cette dérogation aux travailleurs de nuit est subordonnée à l’attribution d’un repos compensateur égal aux heures comprises entre 8 et 12 heures par jour.

La durée maximale journalière de 12 heures ne semble pas applicable aux jeunes de moins de 18 ans, lesquels sont soumis à des dispositions spécifiques, non visées par l’ordonnance du 25 mars 2020.

▪ 60 heures par semaine (au lieu de 48 heures) ;

▪ 48 heures hebdomadaires en moyenne (au lieu de 44 heures) par période de 12 semaines consécutives ;

▪ 44 heures hebdomadaires en moyenne (au lieu de 40 heures) par période de 12 semaines pour les travailleurs de nuit.

▪ les entreprises peuvent réduire la durée minimale du repos journalier sans qu’il soit inférieur à 9 heures consécutives au lieu de 11 heures.

Cette dérogation exceptionnelle à la durée minimale du repos journalier est subordonnée à l’attribution d’un nombre d’heures de repos égal à celui dont le salarié a été privé.

Des précisions sur les modalités de prise de ce repos seront fixées dans les décrets à venir.

Cette dérogation s’applique dans les mêmes conditions que celles relatives aux durées journalière et hebdomadaire de travail : simple décision unilatérale de la direction, absence de consultation préalable du CSE et d’autorisation administrative, information immédiate du comité et de la DIRECCTE.

▪ Les entreprises concernées peuvent accorder le repos hebdomadaire par roulement un autre jour que le dimanche, et ce sans passer par un accord collectif. Cette faculté est ouverte jusqu’au 31 décembre 2020.

→ Dérogations en matière de congés payés

Les entreprises faisant face à un surcroît d’activité consécutif à la pandémie, mais qui ne relèvent pas des secteurs préservant la sécurité et la vie économique et sociale, peuvent utiliser les mesures spéciales relatives aux congés payés.

Au lieu de demander aux salariés de prendre leurs congés, elles peuvent leur demander de les reporter. Elles devront malgré tout respecter les dispositions d’ordre public.

Elles pourront, par accord collectif, suspendre jusqu’au 31 décembre 2020 le droit à congés simultanés de ses salariés mariés entre eux ou liés par un Pacs.

→ Accord de performance collective (APC)

L’accord de performance collective pourrait aménager la durée du travail, ses modalités d’organisation et de répartition au-delà des possibilités offertes dans le cadre légal et notamment dans les secteurs non concernés par les dérogations en matière de durée du travail.